C’est un livre tout à fait passionnant (eh oui !) sur les règles, les menstruations des femmes.
Je pense que c’est le sujet le plus tabou de tous les thèmes autour de la sexualité. D’ailleurs, la seule fois où j’ai osé publier, jusqu’à aujourd’hui, un article sur ce thème, je n’ai jamais eu aussi peu de clics « j’aime ».
Élise Thiébaut est journaliste et s’intéresse beaucoup aux conditions de la femme. C’est à la ménopause qu’elle a décidé de faire un livre sur les règles. Le quotidien des femme... une semaine sur quatre, durant 40 ans ! Et pourtant, on n’en parle pas, ou à voix très basse… on a honte de dire qu’on a mal, on a honte de dire qu’on a ses « ragnagnas », on ne sait même pas comment les appeler et on y trouve plein de sobriquets !
Dans ce livre, elle témoigne de sa vie réglée, dans son endométriose, de ses discussions ou absence de conversations avec sa fille… mais elle raconte aussi les rites religieux, la science, l’histoire des protections... D’ailleurs pourquoi on appelle cela protection, de quoi veux-ton se protéger ?
Elle dit que si c’était l’homme qui perdrait du sang chaque mois, on en aurait fait une tout autre image, il serait si fier de répandre son sang !
Elle parle du repas pour commémorer ses règles, où son père lui dit : « Alors, j’ai appris que tu étais devenue une femme ? »
Je me souviens que lors de cette soirée quelque chose me faisait bouillir intérieurement, sans pouvoir dire quoi. Je sais aujourd’hui que cette publicité autour d’un événement intime est en réalité une violence envers les jeunes femmes, qui tout à coup ne s’appartiennent plus. Il n’existe aucun rituel moderne célébrant les premières pollutions nocturnes des hommes qui portent le doux nom de séménarches. Personne ne va s’aviser de réunir un dîner de famille pour dire à un jeune adolescent : « Alors, il paraît que tu as éjaculé hier ? Bravo tu es devenu un homme, et l’heure est venue d’apprendre à laver tes draps toi-même puisque tu as rêvé si fort la nuit dernière.
Le sang des règles a une odeur, c’est certain. Elle peut varier suivant les moments, suivant les personnes, comme la sueur et comme l’urine, d’ailleurs. Personnellement, j’aime beaucoup le parfum des roses, du citron, de la fleur d’oranger, mais j’aime aussi celle du fromage, de la mer, de la terre mouillée, de l’orage, de l’herbe coupée, de la cire, de l’essence, du feu, de la viande grillée, des tomates pelées, du basilic et de l’ail cru. Avez-vous remarqué que l’odeur des aisselles ressemble furieusement à celle de l’oignon ? Ça vous dégoûte, les oignons ? Moi non. Le sang des règles a fait partie de mon odeur corporelle durant des milliers de jours. Cette odeur peut évoquer celle de la viande rouge. Les chiens la reconnaissent facilement et parfois je la reniflais aussi secrètement, car c’est un fait connu qu’on aime ses propres odeurs, même si l’on nous apprend à en avoir honte. Malgré le conditionnent inscrit depuis des millénaires dans mes gènes féminins et les publicités qui insistaient sur l’obligation de « rester fraîche même pendant ces jours-là », je n’ai jamais réussi me détester suffisamment pour lui trouver des relents marécageux. Sans parler du fait qu’être fraîche me paraissait beaucoup moins intéressant qu’être chaude bouillante, suivant l’adage préféré de mon frère : « La tête froide et le cul chaud, jamais le contraire !
Élise Thiébaut nous donne une autre façon de voir les règles, et cela faits du bien, on se sent moins seule avec nos propres règles, celles qui font partie de notre vie durant toute notre vie fertile, celle qui rythme notre agenda, nos activités !
« Ceci est mon sang, Petite histoire des règles, de celles qui les ont et de ceux qui les font d’Élise Thiébaut, Édition la Découverte 2017